« Coup de tonnerre dans un ciel serein » écrit Gaël, cofondateur de Petit mais Costaud. Ces mots témoignent du bouleversement qui accompagne la prématurité, l’effondrement qui submerge, la sidération qui paralyse. Les proches assistent à cet évènement déroutant avec plus de distance, si bien qu’ils ne réalisent pas toujours la réalité de ce que nous traversons. Si leur appui nous aide à tenir le long parcours de l’hospitalisation, certains mots peuvent nous blesser et être contre-productifs. Comment éviter ces maladresses dans un message de soutien pour un bébé prématuré ? Afin d’aiguiller les familles et l’entourage de parents de petit·e·s costauds, nous vous proposons plusieurs pistes pour épauler ces mamans et papas à la naissance, tout au long de l’hospitalisation et lors du retour à la maison.

Message de soutien bébé prématuré : ce qu’on peut dire (ou pas).

Le contexte de l’hospitalisation : une naissance pas comme les autres

Toutes les 8 minutes, un bébé naît prématurément en France. Malgré cette réalité déconcertante, les enjeux d’une hospitalisation restent largement méconnus pour ceux qui ne sont pas directement confrontés à ces naissances. En tant qu’entourage, prendre la mesure du quotidien dans le service de néonatalogie n’a rien d’une évidence. Comment réagir face à l’angoisse et l’incertitude ? Comment être présent, sans être intrusif ? 

Les maladresses surviennent souvent d’une méconnaissance de l’environnement, de la situation et des émotions qui traversent les parents. En ce sens, vous pouvez vous renseigner spontanément sur la prématurité afin de mieux la comprendre. De cette manière, vous accéderez à un nouveau prisme qui vous permettra de saisir ce qui se joue pour les familles, alors qu’eux-mêmes manquent parfois de mots pour le décrire.

Le décalage entre la vision de nos proches et la réalité de l’hospitalisation, nous avons été nombreux à la ressentir. Dans un post Instagram, Laure, cofondatrice de Petit mais Costaud, évoque ces messages qu’on envoie ou dit avec de bonnes intentions, mais qui approfondissent encore davantage cette dissonance… Et si nous changions la narration ? Si nous trouvions des mots qui réconfortent et qui réchauffent ?

Un message de soutien accueille les émotions, sans dédramatisation

« Ne t’en fais pas, ça va aller »

Lors d’une hospitalisation, nous ne sommes jamais sûrs de rien. Chaque jour, chaque minute est un combat que nous traversons à l’aveugle. Dans le service de néonatalogie, nous côtoyons l’incertitude et les doutes. La prématurité engage le pronostic vital et cette gravité pèse lourdement sur nos épaules. 

Face à un tel enjeu, les parents n’attendent pas qu’on leur remonte le moral ou qu’on évoque cette phase comme une passade. Tout simplement parce qu’il est impossible d’affirmer quoi que ce soit sur l’avenir. Lorsque nous vous confions notre peur ou notre détresse, il n’est pas nécessaire de nier les difficultés. 

Au lieu de taire la souffrance comme une émotion éphémère destinée à disparaître, vous pouvez l’accueillir. Il n’y a qu’une réponse possible face au stress émotionnel : l’empathie. Votre écoute et votre présence sont le plus puissant message de soutien que vous pouvez transmettre.

Ce que l’on peut plutôt dire : « Je comprends tes peurs, nous sommes là pour t’accompagner ».

« Au moins, tu n’as pris que 7 kg »

Pendant la grossesse, les mamans se battent pour gagner un jour, une semaine de plus sur le terme et garder leur bébé au chaud. La prématurité n’est pas un choix, elle est une conséquence. Rappeler la perspective d’un troisième trimestre inaccessible crée de la culpabilité, un sentiment déjà bien trop familier pour les mères : 

« Et cette foutue culpabilité ! Voilà j’aurais dû arrêter de travailler (je suis coiffeuse donc toujours debout), voilà j’aurais dû faire plus attention pendant le déménagement !!! Et si, et si… »

Priscilla, maman de Gloria née à 31SA

« La peur nous envahit pendant quelques minutes et puis les questions, est-ce qu’il va vivre ? Comment va-t-il être lorsqu’il sortira ? Comment on va faire ? Nous ne sommes pas prêts à être parents à 6 mois de grossesse, qui est prêt à cela ? »

Océane, maman de Gaspard né à 28SA

« Je ne supportais plus de voir des femmes enceintes se plaindre du 3e trimestre que j’aurais tant aimé connaître. »

Aurélie, maman de Valentin né à 29SA

« 11 ans plus tard, j’ai appris à ne plus culpabiliser de l’avoir fait naître trop tôt. Ce n’est pas moi. C’est la nature qui est ainsi faite. Mais ce combat avec moi-même a été difficile. »

Marion, maman d’une petite costaud

Ce que l’on peut plutôt dire : « tu as réussi à le·la garder au chaud aussi longtemps que tu pouvais et maintenant vous êtes bien entourés pour donner toutes ses forces à ce·cette petit·e costaud ! »

« Ah ben du coup ça va, c’est pas toi qui gères les nuits au moins tu dors »

Le message part certainement d’une bonne intention. Pourtant, au lieu d’apporter de la légèreté, il témoigne surtout d’un profond décalage avec la réalité de l’hospitalisation. Si les parents ne se réveillent pas sous les pleurs de leurs bébés, il n’en demeure pas moins que leur sommeil est fractionné par la crainte : est-ce que le téléphone va sonner et annoncer une mauvaise nouvelle ? Quel sera son état de santé demain ? Comment va-t-il·elle en ce moment même ?

Nous aimerions rester le plus longtemps possible aux côtés de nos mini super-héros et super-héroïnes, mais nous ne le pouvons pas toujours. Face à cette douloureuse séparation, les allers-retours à l’hôpital entraînent une immense fatigue, d’autant plus si la famille compte plusieurs enfants. 

Ce que l’on peut plutôt dire : « vous devez être tellement fatigués ! Si nous pouvons vous soulager avec les courses/le ménage/le transport/l’hébergement, nous serions ravis de vous aider. »

Que peut-on souhaiter aux parents lors d'une naissance prématurée ?

À chaque enfant, son histoire : respectez le parcours singulier des parents

« C’est comme la fille de untel née à xx semaines »

La prématurité s’accompagne de nuances selon l’âge gestationnel et l’état de santé du nouveau-né. L’expérience actuelle de vos proches ne correspond à aucune autre. D’autre part, la comparaison, notamment sur des stades du développement de l’enfant prématuré, ne sert pas à relativiser. 

Aucune référence extérieure ne peut apaiser l’incertitude qui règne dans le cœur des parents. Le bouleversement ressenti ne s’atténue pas face à celui d’une autre histoire. Pour autant, l’expérience d’autres parents peut apporter du soutien, du moment qu’elle n’est pas imposée, mais demandée.

Ce que l’on peut plutôt dire : « Si tu as envie de te confier, je connais untel qui a eu un enfant prématuré et serait ravi d’échanger avec toi. »

« Mon bébé aussi est prématuré, il est né deux semaines avant terme »

Une naissance prématurée survient entre 24 et 37 semaines d’aménorrhée. Au-delà, il s’agit d’une grossesse à terme. Dans cette large période figure plusieurs stades de prématurité qui induisent un développement et un suivi particulier. Une nouvelle fois, l’unicité et la singularité de chaque parcours éloignent la possibilité de comparaison. 

Si vous désirez manifester votre soutien pour les parents d’un nouveau-né prématuré, l’important est de rester à leur écoute, prêt à offrir de la disponibilité, s’ils en ont besoin, pour raconter leur histoire et leur ressenti. 

Ce que l’on peut plutôt dire : « Si tu souhaites partager ton expérience, je serai là pour t’écouter. »

Accueillir le nouveau-né, en respectant l’environnement dans lequel il évolue

« Je ne te souhaite pas félicitations, vu le contexte »

C’est vrai, un texte de félicitation pour un bébé prématuré peut sembler déplacé face à un environnement anxiogène et à l’incertitude liée à la survie du nouveau-né. Toutefois, chaque famille possède sa propre sensibilité. Les parents d’enfants prématurés n’en restent pas moins des parents, même si leur bébé n’est pas encore à la maison. 

Si votre message n’adopte pas le ton festif utilisé pour une naissance à terme, rien ne vous empêche d’envoyer des pensées positives. Un mot d’encouragement ou une jolie carte avec un texte réconfortant offrira certainement une bulle de douceur aux familles.

Ce que l’on peut plutôt dire : « Bienvenue parmi nous xx, nous sommes ravis de t’accueillir dans notre famille/groupe d’amis. Nous vous envoyons beaucoup de courage et sommes de tout cœur derrière vous. »

« Je préfère attendre la sortie de l’hôpital pour offrir un cadeau »

Offrir un cadeau à un nouveau-né prématuré permet de l’inscrire dans la famille ou le cercle d’amis, sans réserve et sans condition. De nombreuses idées s’intègrent parfaitement avec l’hospitalisation et participent même à renforcer le lien parent-enfant. Sur cette question, vous trouverez nos recommandations dans un article écrit en collaboration avec Séverine Prat, ex-infirmière en réanimation néonatale, aujourd’hui spécialisée en ostéopathie périnatale et pédiatrique.

Néanmoins, la question du cadeau de naissance pour un bébé prématuré dépend de l’état psychologique dans lequel se trouvent les parents. Certains préfèrent attendre la stabilité de l’état de santé de leur petit·e costaud, lorsque d’autres accueillent avec plaisir cette attention. Si vous ne parvenez pas à sonder les parents sur cette question, n’hésitez pas à interroger les soignants qui vivent l’hospitalisation à leurs côtés.

Ce que l’on peut plutôt dire : « Voilà un cadeau qui va vous aider et vous soutenir pendant l’hospitalisation/le retour à la maison. Nous espérons qu’il vous apportera du réconfort. Toutes nos pensées. »

Que peut-on dire à des parents d'un bébé prématuré ?

Le retour à la maison : une transition qui n’efface pas la prématurité

« Il est si petit »

Petit, oui, mais costaud ! Les mots véhiculent un sens, d’autant plus quand ils se rattachent avec une expérience douloureuse. La prématurité se vit comme un traumatisme, de l’ordre du stress post-traumatique. Pour cette raison, certains termes viennent réveiller une cicatrice récente et sensible comme l’indique Laure :

« une amie ne supportait pas qu’on parle de son “petit” bébé. Ce terme était trop douloureux pour elle, il lui rappelait constamment la naissance trop tôt de son bébé ».

Ce que l’on peut plutôt dire : « Il·Elle a tellement grandi ! Quel chemin parcouru ! »

« Il est sorti de néonat’, c’est derrière vous maintenant ! »

L’expérience de la prématurité marque durablement les familles. Les parents n’oublient pas les semaines qui se sont écoulées et le souvenir peut rester douloureux même un an, deux ans ou plusieurs années plus tard. 

Le chemin de guérison demande de la patience et de la bienveillance. Si la situation reste compliquée pour les parents, il faut accepter et respecter cette réalité, sans chercher à la minimiser. 

Ce que l’on peut plutôt dire : « Quelle victoire, vous êtes rentrés à la maison ! Sachez que nous sommes toujours là si vous avez besoin. »

Un message de soutien pour un bébé prématuré s’appuie sur votre écoute et votre empathie. Sans jugement ni comparaison, vos mots transmettent de la force et des pensées positives pour aider les parents à avancer dans cette épreuve. Si vous souhaitez aller plus loin dans votre accompagnement, nous avons construit avec Séverine Prat une série en trois volets qui regroupent des conseils pour chaque étape : 

Nous serions heureux de recevoir votre témoignage sur les messages que vous avez reçus : quelles phrases de vos proches vous ont heurté ou au contraire reconforté ? Vous pouvez nous partager votre expérience sur notre page contact, en message privé sur nos réseaux sociaux (Facebook et Instagram) ou dans les commentaires de cet article.

Si vous avez aimé l'article, vous êtes libre de le partager :)